lundi 8 juin 2009

L’Université Paris-Dauphine toujours mobilisée contre la "réforme" de l'enseignement supérieur et de la recherche

Après s’être engagés pendant plus de 20 semaines dans l’un des mouvements les plus longs et les plus durs contre la réforme de l’enseignement supérieur et de la recherche, les enseignants-chercheurs, chercheurs, personnels BIATOSS et étudiants de Paris-Dauphine dont les noms suivent tiennent à exprimer leur profond désarroi et leur extrême inquiétude quant à la poursuite de ladite réforme. Sans concertation véritable avec les instances représentatives, dans une surdité absolue et au mépris des principes pourtant affichés de « négociation » et de « participation » sociales, usant de stratagèmes qu’on ne peut que regretter dans le cadre d’une démocratie pour faire diversion et désinformer le grand public, le gouvernement entend bien faire passer ses réformes à la fois sur le statut des enseignants-chercheurs, sur le contrat doctoral unique, sur la mastérisation, sur le démantèlement des organismes de recherche et sur celui en définitive de l’université.


Bien que cela ne soit peu connu de « l’opinion publique » et contrairement à une idée reçue qui voudrait que seules les universités les moins favorisées se soient engagées dans le mouvement, les enseignants-chercheurs de l’Université Paris-Dauphine ont largement pris part, tout au long de cette mobilisation, aux actions de protestation et ce, quel que soit leur statut et leur discipline. Le choix a été de combiner plusieurs formes d'insertion dans le mouvement : information des étudiants et discussions dans le cadre des cours ; mise en place de cours alternatifs (dont les « Vendredis de Dauphine » avec invitations d'intervenants extérieurs analysant les effets de l'application des réformes dans d'autres pays et leurs enjeux pour la formation et la recherche), et près d’une dizaine d’assemblées générales ont été organisées, ainsi qu’une action commune avec l’Université de Paris VIII et l’INALCO à l’occasion de la célébration des 40 ans de Dauphine. Une pétition, lancée en décembre 2008 contre le décret sur le statut des enseignants-chercheurs, a recueilli près de 175 signatures parmi les universitaires de Paris-Dauphine, dont des gestionnaires, des économistes, des juristes, des mathématiciens, des informaticiens, des sociologues, des linguistes et des politistes. Surtout, c’est près de 50 % des enseignants qui, en premier cycle et toutes matières confondues, ont retenu leurs notes d’examen du premier semestre. Ce taux est particulièrement important dans les départements Licence de Sciences des organisations (près de 2500 étudiants) et Mathématiques et informatique de la décision et des organisations (près de 1300 étudiants). Contrairement à l’idée véhiculée par les membres du gouvernement et reprise, sans vergogne mais de manière significative, par certains organes de presse, il ne s’est nullement agi d’« enseignants irresponsables » ou de « groupes irréductibles et extrémistes », ni même d’une minorité, mais bien au contraire d’universitaires de tous horizons soucieux de la qualité du service public d’enseignement et de recherche et fondamentalement et irréductiblement attachés aux principes d’égalité et d’excellence pour le plus grand nombre.


C'est dans le but de pouvoir exprimer la position la plus collective et visible possible que nous avons tenu une nouvelle réunion à Paris-Dauphine ce 28 mai à 12h qui a rassemblé environ 60 personnes, enseignants-chercheurs et personnels Biatoss. Nous avons constaté les difficultés générales et locales de la mobilisation pour de multiples raisons, et estimé que, dans le contexte de la campagne de désinformation menée contre les enseignants-chercheurs et d'étiolement de la mobilisation, mettre en danger la tenue des examens du 2nd semestre n'aiderait pas à faire comprendre et même entendre notre point de vue. Les mêmes arguments ont prévalus, quant à la poursuite de la rétention des notes, considérée majoritairement comme une mesure inadéquate pour l'instant.

Mais ce jugement porté sur les modalités d'actions s'est accompagné d'une appréciation optimiste de ce qui s'est aussi construit dans ce mouvement, et d'une claire volonté de continuer, sous d'autres formes, notre mobilisation.


Nous avons donc décidé tout d'abord de nous donner les moyens de faire publiquement connaître aux instances de notre université, à nos gouvernants, à nos étudiants et à la population ce qu'a été et ce qui demeure notre point de vue : nous réaffirmons donc notre opposition à la fois aux décisions iniques et particulièrement inquiétantes concernant le processus de démantèlement de la fonction publique de l'enseignement et de la recherche affectant notre statut, celui des doctorants et des personnels BIATOSS, la formation des enseignants et l’organisation de la recherche publique. Nous sommes particulièrement choqués par la façon dont les décrets et décisions sont imposés par le gouvernement à la communauté universitaire.

Nous décidons par conséquent :

  1. de faire signer parmi le personnel de Paris-Dauphine cette analyse et de la rendre publique ;
  2. sur cette base de consolider, étendre, péréniser la mise en place d'un Collectif Dauphine, doté d'un site, qui restera vigilant et mobilisé de façon solidaire avec l'ensemble de la communauté des étudiants, enseignants-chercheurs et personnels des universités contre ces réformes.

Un tel Collectif qui tiendra une première réunion en juin, sera inclusif de toutes les personnes (individuelles, représentants syndicaux ou associatifs, ou liés à des listes d'élus...) partageant nos objectifs :

  • s'inscrire au plan local, national et européen dans une réflexion et action durable en défense des services publics d'éducation et de recherche contre des politiques que la crise mondiale actuelle délégitime profondément ;
  • préparer dans ce cadre des Etats-généraux de l'enseignement supérieur en organisant à Dauphine une série de rencontre-débats et autres initiatives ;
  • veiller à obtenir des instances de l'université Paris Dauphine une transparence et des débats sur l'interprétation et l'application de décrets éminemment ambigus que nous restons prêts à contester.